Couleurs jordaniennes

 

 

A l’orée du désert-pastel domiroy

Texte de Monique Royer suite à son voyage en Jordanie . Illustré par un pastel de Domiroy, né de l’évocation et des photos de ce séjour.

« Accordez-moi le droit de laisser l’imaginaire colorer le récit »

 

 

Se nettoyer de tout, des aspérités d’une vie laborieuse où la performance se mesure par des critères aléatoires, du soupçon de naïveté que récolte l’enthousiasme, de la brutalité de rapports humains où le savoir-vivre devient une option, des intolérances en banderilles écarlates qui heurtent de plein fouet les idéaux essentiels.

Retrouver la brise de la légèreté.

Laisser à nouveau l’universel amour couler calmement dans les veines des sensations.

A l’orée du désert du Wadi Rum, les yeux trouvent un remède instantané dans la beauté des lieux. Ils pourraient aussi s’attarder sur les traces plastiques laissées de ci de là par l’activité humaine. Regarder ce qui est beau et le vivre à plein.

Photo Monique Royer

La beauté du désert se lit aisément, dans les teintes pastel innombrables du sable. Là-bas au loin, il semble une marée vert pâle, à l’approche du lieu, il devient jaune parsemé d’une végétation éparse. Parfois il se fait rose, à d’autres moments il se colore de bleu, dans des vagues rondes en attente de la marée du vent.

 

Il s’agglomère en petites montagnes, des dunes que l’on gravit lentement, le pas englouti par l’épaisseur des grains. Et tout autour les falaises forment autant de figures gigantesques que l’on s’amuse à interpréter. La lumière joue avec les surfaces, avec les couleurs, transformant au fil du jour et de la nuit le décor. Rien ici ne semble permanent et l’invitation à l’imaginaire est constante. Des rayons du soleil aux éclats de la lune, les astres s’amusent à décupler nos vues. Les roches sont autant de souvenirs des siècles passés par là, de la mer aussi qui s’étalait ici. L’immensité ne broie pas les âmes, elle donne la certitude que l’on est vivant parmi les vivants, être au sein des éléments, humain dans la nature éperdue. Elle rend douces et belles les secondes qui filent, légères.

Photo Monique Royer

Les pas s’accordent, s’étirent, se regroupent, les conversations et les rires ponctuent les parenthèses de silence. On s’arrête, perchés sur des rochers, pour goûter au soleil, s’allonger ou frotter des pierres ocres pour produire une poudre qui paraît-il se transforme en joli maquillage. La halte est aussi un  prétexte pour reposer les jambes, répondre à la faim ou à la soif qui se manifeste, et laisser les yeux s’immerger dans le fabuleux décor. Les uns avec les autres, on fait connaissance, sans véritables questions, en partageant le bonheur des chemins de traverse. Ceux que nous empruntons ont été soigneusement choisis par le guide pour être à l’écart des circuits fréquentés. Nous croisons de temps à autre des chameliers et plus rarement des 4×4.

Le soir et sa fraîcheur s’installent tôt avec dans leur sillage les éclats de la lune transformant à leur tour le paysage. Nous campons dans des décors fabuleux, cratère ou anse de rochers. L’hôte de nos abris nomades conjugue à merveille l’hospitalité, dans les mets qu’il prépare, dans l’univers qu’il plante, tapis garni de coussins, cercle de sièges autour du feu où une théière souffle de la fumée parfumée, dans le zeste de folie qu’il glisse pour ranimer les conversations . Peu avant18 heures, le désert habillé de nuit sonne l’heure de la veillée et à la façon du « Blending Soul and Shades » de Dhafer Youssef, la beauté du lieu, la beauté de l’instant s’enveloppent d’un léger voile mystique.

Monique Royer 

https://couleursjordanie.tumblr.com/

 

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